Programme 2025 du séminaire d'anthropologie diachonique - Des tubercules au riz, de l'orge au blé. Transitions culturales alimentaires

5 février 9 avril 2025

Programme du séminaire d’anthropologie diachronique (ethnologie et archéologie)
interdisciplinaire commun université de Strasbourg, université Paul Valéry-Montpellier 3, CNRS


Thème de l’année 2024-2025 :
« Des tubercules au riz, de l'orge au blé… Transitions culturales et alimentaires »
(dédié à Nicolaï Vavilov, inventeur de la géographie génétique des plantes cultivées)
 


sous la direction de
Pierre Le Roux (ethnologue, professeur, université de Strasbourg)
et Luc Jallot (archéologue préhistorien, maître de conférences HDR, université Paul Valéry-Montpellier 3)


Séminaire d’enseignement et de recherche de niveau doctorat et master, ouvert aux doctorants (en particulier à ceux de l’ED 519 « Sciences humaines
et sociales - Perspectives européennes », de Strasbourg), aux étudiants de licence et au public cultivé sur acceptation des organisateurs)

Comité d’organisation
Florent Jodry (INRAP, ARCHIMEDE), Matthieu Michler (INRAP, ARCHIMEDE), Bernard SELLATO (CNRS)


Laboratoire SAGE (UMR 7363 CNRS & univ. de Strasbourg)
Laboratoire ASM (UMR 5140 CNRS & univ. Paul Valéry-Montpellier 3) & Groupes de réflexions modestes (GRM)
Laboratoire ARCHIMEDE (UMR 7044 CNRS & univ. de Strasbourg)
INRAP-Grand Est, Centre d'archéologie de Strasbourg
Maison interuniversitaire des sciences de l'Homme en Alsace (MISHA)

Séminaire hybride : en présence à la salle des conférences de la MISHA, campus Esplanade, université de Strasbourg,
et simultanément à distance via BBB, salon séminaire d’anthropologie diachronique, lien https://bbb.unistra.fr/b/pie-pzw-qrj-ohy


24 h en 8 séances de 3 h + pause (+ une séance de synthèse finale) - mercredi 14h-17h30
Séance 1 : mercredi 5 février 2025 ; Séance 2 : mercredi 12 février 2025 ; Séance 3 : mercredi 26 février 2025
Séance 4 : mercredi 5 mars 2025 ; Séance 5 : mercredi 12 mars 2025 ; Séance 6 : mercredi 19 mars 2025
Séance 7 : mercredi 26 mars 2025 ; Séance 8 : mercredi 2 avril 2025 ; Séance 9 : mercredi 9 avril 2025


PRÉSENTATION
Le thème « Des tubercules au riz, de l’orge au blé... Transitions culturales et alimentaires », est abordé dans une double approche ethnologique/anthropologique et archéologique et dans une dimension diachronique et comparative, c’est-à-dire à la fois spatiale et temporelle. À partir d’exemples ethnographiques, historiques et archéologiques, on tentera de cerner contextes et raisons du changement cultural survenu dans des aires culturelles et/ou historiques marquées jadis par la chasse-collecte ou l’horticulture délaissées au profit de l’agriculture et de l’élevage et surtout, dans des régions et sociétés longtemps caractérisées par la mise en culture et la consommation d’un tubercule ou d’une céréale particulière dominante, les raisons de l’abandon de celui-ci ou de celle-ci au profit d’une plante importée. Ainsi, le gland et l’orge ont précédé le blé dans l’Europe ancienne ; les ignames et taros furent antérieures au riz dans le Pacifique et en Asie du Sud-Est ; le millet et le sorgho devancèrent le manioc, la banane ou le riz en Afrique subsaharienne. En Chine, les glands furent longtemps consommés avec des baies, cucurbitacées et ignames avant le blé, le millet ou le riz. À Bornéo, l’adoption tardive du riz est-elle le résultat d’une diffusion culturelle, d’une amélioration agronomique ou d’une recherche sociale locale de prestige ? En effet, bien des choix de transition agricole et alimentaire retenus surtout pour des raisons ostentatoires et donc culturelles peuvent aller, comme à Bornéo, à l’encontre de strictes raisons d’optimisation du rapport calories produites/travail fourni. En Europe, pas tant pour confectionner des bières que pour se nourrir, l’orge régna longtemps. En témoigne l’inch ou pouce anglo-saxon, unité de mesure valant 2,54 cm dont la base est le grain d’orge (douze grains placés longitudinalement dans le sens de la longueur). En Afrique subsaharienne, les millets, sorgho, fonio, dominaient avant d’être concurrencés puis évincés par des tubercules ou céréales venus d’ailleurs. Ces transitions alimentaires impliquent des adoptions ou inventions, c’est-à-dire des processus de changements techniques et culturels, au-delà des produits innovants, vers des transformations civilisationnelles profondes. Au Proche-Orient, les premières céréales domestiquées semblent faire l’objet d’essais et d’une diffusion en mosaïque. Les vecteurs de cette diffusion restent mal connus. Le déplacement de groupes de pasteurs a été évoqué mais l’adoption de nouvelles pratiques agricoles n’est pas immédiate. Pêcheurs et chasseurs-collecteurs maintiennent leur mode de vie, échangeant peu avec les agriculteurs. Des régions entières enregistrent ces phénomènes de voisinage ou de confrontation qui ont pu se prolonger longtemps. En Amérique du Nord avant la colonisation européenne, mais aussi dans les bassins des grands fleuves chinois, la cueillette de céréales sauvages telle Zizania aquatica fut longtemps privilégiée. Au Proche-Orient, l’agriculture fut précédée par des millénaires d’une récolte intensive de graines et céréales sauvages en complément de la chasse et de la pêche. Le teff (Eragrostis tef), céréale à grains minuscules cultivée en Éthiopie complète l’alimentation à base d’ensete ou (faux) bananier d’Abyssinie (Ensete ventricosum). Entre les premiers cultivateurs sédentaires et les pasteurs se dessine une frontière qui évolue jusqu’à nos jours. L’économie de stockage installée, avec greniers et silos, des questions se posent relatives à la consommation des glands jadis largement répandue, à l’arrivée de nouvelles plantes comestibles ou médicinales, à l’effondrement de pratiques culturales et son effet démographique, à la présence d’instruments de mouture dans les tombes et de rites possibles liés à la consommation des céréales. Les intervenants pourront préciser dans la mesure du possible quels sont les types de marqueurs témoins des plantes et techniques autrefois dominants, ainsi que les raisons envisagées, faits connus ou hypothèses étayées, des abandons conséquents aux adoptions ou inventions de nouveaux produits, ainsi que la manière dont anciens comme nouveaux produits sont obtenus, consommés ou utilisés. Des plantes, animaux ou techniques exogènes à la région concernée pour une époque considérée, certains apparus très récemment, et les techniques de production, de consommation et d’utilisation afférentes, ont pu s’incorporer aux traditions locales et même engendrer des mythes d’origine dont il faudra essayer de rendre compte en tenant d’expliquer les raisons de tels choix culturaux, techniques et alimentaires victorieux. Ainsi, le piment, le maïs, l’hévéa, plantes d’Amérique latine implantées en Asie du Sud-Est par les européens ont parfois nourri une cosmogonie étayant localement leur origine « millénaire ». De la sorte, archéologie, en particulier néolithique, ethnologie et anthropologie sociale de sociétés vivantes ou subactuelles, géographie, ethnobotanique, génétique, linguistique, ethnohistoire, gastronomie, anthropologie économique, technologie (comme étude des techniques), manières de table, pourront se côtoyer et coopérer utilement pour éclairer ce thème récurrent mais resté assez énigmatique.
 
PROGRAMME DES SÉANCES
1. mercredi 5 février 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« Printemps 52 av. J.-C. : les cultures des Gaulois en plaine versus alimentation des oppida de Gondole, Gergovie et Corent », conférence de Manon Cabanis (archéo-botaniste, HDR en sciences de la vie, responsable de la cellule « Économie végétale et environnement », direction scientifique et technique INRAP, laboratoire GEOLAB, Géographie physique et environnementale, UMR 6042 CNRS & univ. de Limoges)
• 2e intervenant
« État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde », conférence d’Antoine Hochet (anthropologue, expert technique international « Gouvernance foncière » détaché à la FAO, Rome, maître de conférences, université de Mayotte, laboratoire Savoirs Environnement et Société, UMR 268 IRD & CIRAD & université Paul Valéry-Montpellier 3)

2. mercredi 12 février 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« Transitions alimentaires préhistoriques et historiques au Cameroun » [titre provisoire], conférence de Geoffroy de Saulieu (archéologue, directeur de recherche IRD, laboratoire PALOC, UMR 208 IRD & MNHN)
• 2e intervenants
« De la forêt à la céréale… l’histoire d’une domination totale et irréversible ? », conférence de Geneviève Michon (ethnobotaniste, directrice de recherche classe exceptionnelle à l’Institut de recherche pour le développement, laboratoire SENS « Savoirs, Environnement, Sociétés », UMR IRD, CIRAD, université Paul-Valéry Montpellier 3)


3. mercredi 26 février 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« La balanophagie (consommation des glands) dans les sociétés européennes anciennes », conférence de Philippe Marinval (archéologue-carpologue, chercheur CNRS e. r., laboratoire Archéologie des Sociétés Méditerranéennes-ASM, UMR 5140 CNRS & univ. Paul Valéry-Montpellier 3)
• 2e intervenant
« Transitions agro-alimentaires des systèmes conventionnels européens » [titre provisoire] conférence d’Alexis Gonin (géographe, maître de conférences en géographie, université Paris Nanterre, laboratoire Mosaïques et Laboratoire Architecture, ville, urbanisme, environnement-LAVUE, UMR 7218 CNRS & univ. Paris Nanterre, Paris 8, ENSA Paris-Val-de-Seine)


4. mercredi 5 mars 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« Bonne à boire et à manger. Les différentes facettes de l’orge », conférence de Matthieu Michler (archéologue à l’INRAP, Centre archéologique Strasbourg, laboratoire ARCHIMEDE, UMR 7044 CNRS & univ. de Strasbourg)
• 2e intervenant
« Tu manges ta monnaie ! Changements climatiques et adaptation du quotidien : l’orge contre le riz au Zanskar (Himalaya indien) », conférence de Salomé Deboos (professeur d’anthropologie sociale, univ. Louis-Lumière-Lyon 2, Laboratoire d’anthropologie des enjeux contemporains-LADEC)

5. mercredi 12 mars 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« Du champ à l’estomac. Évolution des usages des plantes alimentaires (Duupa, Massif de Poli, Cameroun) », conférence d’Éric Garine Wichatitsky (anthropologue, maître de conférences HDR à l’université Paris Nanterre, Laboratoire d’ethnologie et de sociologie comparative, UMR 7186 CNRS & univ. Paris Nanterre)
• 2e intervenant
« De l’orge au pain », conférence de Florent Jodry (archéologue-lithicien à l’INRAP, Centre archéologique de Strasbourg, laboratoire ARCHIMEDE, UMR 7044 CNRS & univ. de Strasbourg)

6. mercredi 19 mars 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« L’alimentation carnée à la préhistoire », conférence de Magali Fabre (archéozoologue à l’INRAP Grand-Est, Centre archéologique de Strasbourg, docteur de l’université de Provence (Aix-Marseille I), laboratoire ARCHIMEDE, UMR 7044 CNRS & univ. de Strasbourg)
• 2e intervenant
« Transitions alimentaires en milieu alpin à travers deux exemples : le fromage et les jardins », conférence de Claire Delfosse (géographe, professeure à l’univ. Louis Lumière-Lyon 2, département Géographie et aménagement, directrice du Laboratoire d’Études rurales, EA 3728 univ. Lumière Lyon 2-Isara, USC INRAE)

7. mercredi 26 mars 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« Panchronie des transitions alimentaires et culturelles au iiie millénaire avant J.-C. », conférence de Luc Jallot (archéologue, maître de conférences HDR à l’univ. Paul Valéry-Montpellier 3, laboratoire Archéologie des Sociétés Méditerranéennes-ASM, UMR 5140 CNRS & univ. Paul Valéry-Montpellier 3)
• 2e intervenant
« Marqueurs linguistiques des transitions alimentaires à Bornéo », conférence de Bernard Sellato (ethnologue, directeur de recherche émérite CNRS, laboratoire Centre Asie du Sud-Est-CASE, UMR 8170 CNRS, EHESS & INALCO)

8. mercredi 2 avril 2025 (14h-17h30)
• 1er intervenant
« Éleveurs d’abord, agriculteurs ensuite et pas partout : le cas des premières sociétés de production dans la Corne de l’Afrique », conférence de Xavier Gutherz (archéologue, professeur émérite à l’univ. Paul Valéry-Montpellier 3, laboratoire Archéologie des Sociétés Méditerranéennes-ASM, UMR 5140 CNRS & univ. Paul Valéry-Montpellier 3)
• 2e intervenant
« Le froment comme monnaie végétale : un bio artefact à la croisée de l’anthropologie sociale et de l’écologie politique (Damgan, Bretagne Sud) », conférence de Sophie Laligant (anthropologue, docteure de l’EHESS en anthropologie sociale, maître de conférences HDR HC, université de Tours, laboratoire CITERES, Équipe Construction politique et sociale des territoires, UMR 7324 CNRS & univ. de Tours)

9. mercredi 9 avril 2025 (14h-17h30)
« Des tubercules au riz, de l’orge au blé… Transitions culturales et alimentaires. Conclusion et débat », synthèse de Pierre Le Roux et Luc Jallot, et débat avec les conférenciers des huit séances passées et les auditeurs [en présence à Strasbourg et en ligne]