Colloque International
Building concepts in Intercultural context
Interroger le pédagogue et sa pédagogie dans la construction d’un projet de recherche
Strasbourg, les 23 et 24 janvier 2020
MISHA, Salle des conférences
Ce colloque, le premier du genre, s’intéresse plus particulièrement aux difficultés et enjeux de la transmission dans le cadre de la construction d’un sujet ou projet de recherche et ce dans un contexte interculturel.
En effet, la pédagogie est cette science qui se veut, dans le cadre de la recherche et de la conception d’un projet de recherche, une maïeutique de la pensée conceptuelle du néophyte qu’est l’étudiant qui se destine à une carrière de chercheur ou d’enseignant – chercheur. D’autres avant nous, ont tenté de l’imager, notamment en illustrant cette transmission par la représentation de nains juchés sur les épaules de géants que sont nos pairs.
Aujourd’hui, dans un monde où la circulation des concepts ainsi que leur traduction ou transcription est tout à la fois simple et complexe, comment le pédagogue, le professeur, arrive à transmettre toute l’épaisseur d’un concept, entendu de manière disciplinaire, à l’étudiant ou au jeune chercheur dans un contexte interculturel ? Quelles sont les difficultés rencontrées ? Quelles sont les stratégies, si celles-ci existent, qui peuvent être mises en place pour permettre au maître et à l’élève de saisir le concept et son camaïeu d’acception dans la discipline donnée, dans une même perspective de construction de projet de recherche, et donc être à même de traduire et conceptualiser les résultats de leurs analyses de recherches dans un langage commun ?
En effet, si la pensée scientifique en français est le plus souvent exprimée de manière éthérée, la pensée scientifique japonaise est illustrée, s’inscrit dans le concret, quand de son côté, la pensée scientifique anglo-saxonne s’exprime de manière pragmatique. De fait, comme Emile Benveniste le rappel dans son ouvrage Problèmes de linguistique générale, 2 (1974, Gallimard, Paris) « ce qui change dans la langue, ce que les hommes peuvent changer, ce sont les désignations qui se multiplient, qui se remplacent et qui sont toujours conscientes, mais jamais le système fondamental de la langue. […] Elle [la langue] est une identité à travers les diversités individuelles. […] à la fois immanente à l’individu et transcendante à la société » (pp.94-95) et de continuer, toujours dans le même ouvrage « la langue est – comme ils [les auteurs] disent- le miroir de la société » (p.97).
Aussi, cette réalité rend d’autant plus complexe la transmission, cette filiation intellectuelle qui fait qu’un étudiant choisit le professeur tout autant que l’enseignant-chercheur choisit l’étudiant. En effet, une pédagogie d’accompagnement dans la construction de l’objet d’étude et de recherche amène le professeur à se positionner le plus souvent comme miroir pour l’étudiant : non pas un miroir passif, un simple reflet, mais un miroir animé, où l’étudiant grâce aux conversations et discussions avec le professeur, peut apprécier par lui-même les points forts, les pierres d’angles de son raisonnement, tout autant que les failles et les points de projection personnelle sur son objet d’étude.
De fait, « Le dialogue a deux formes, nous dit Diogène de Laërce ; il est diégétique (sous forme d’exposition), ou zététique (sous forme de recherche). […] Le dialogue zététique peut avoir lui aussi deux formes différentes : il peut être gymnique (d’exercice) et agonistique (de combat). Le genre gymnique se subdivise en maïeutique (qui accouche les esprits) et en peirastique (qui éprouve, qui sonde). L’agonistique se subdivise également en deux espèces : l’endictique (démonstrative) et l’anatreptique (réfutative) » (Platon, premiers dialogues traduction E. Chambry).
Ainsi, ce colloque sera l’occasion d’explorer, dans le cadre d’un dialogue interdisciplinaire, les différences entre portée de la pensée et application de la pensée dans le cadre de la construction et structuration d’un projet de recherche faisant appel à des concepts aux acceptions multiples en fonction des locuteurs qui s’en saisissent.
Comité scientifique :
Salomé DEBOOS, Anthropologue, Maîtresse de Conférence à l’Université de Strasbourg, laboratoire de recherche Savoirs Acteurs et Gouvernements en Europe (UMR7363)
Géraldine LEROUX, Ethnologue, Commissaire d’expositions, Maîtresse de Conférences à l’Université de Bretagne Ouest, Centre de Recherche Bretonne et Celtique
Elisabeth LAMBERT, Juriste spécialiste des droits de l’Homme et droit de l’Environnement, Directrice de recherche CNRS, laboratoire de recherche Savoirs Acteurs et Gouvernements en Europe (UMR7363)
Su-mei LO, Anthropologue, Professeur à la National Taïwan University, Taïwan
Contacts : deboos[at]unistra.fr, geraldine.leroux[at]univ-brest.fr