Geremia Cometti Professeur des universités (habilité à diriger des thèses)

Amérique du Sud, Andes péruviennes, Patagonie, Anthropologie de la nature, Anthropologie et développement, Anthropologie et soutenabilité, Changement climatique, Études sur les migrations, Extraction minière en Amérique du Sud, Agriculture industrielle et élevage intensif en Amérique du Sud, Viticulture biodynamique, Ethnographie et méthodes qualitatives

Responsabilités scientifiques et administratives

  • Vice-doyen de la Faculté des sciences sociales de l’Université de Strasbourg (depuis 2022)
  • Assesseur pédagogique de la Faculté des sciences sociales (depuis 2022)
  • Responsable de mention de licence "sciences sociales" (depuis 2022)
  • Co-responsable de la mention de master "ethnologie" (depuis 2020)
  • Directeur des études du master 2 parcours "anthropologie sociale et culturelle" (depuis 2020)
  • Membre du Conseil de la Faculté des sciences sociales (depuis 2018)
  • Membre de la Commission pédagogique de la Faculté des sciences sociales (depuis 2018)
  • Membre du Bureau de direction du Laboratoire interdisciplinaires en Études Culturelles (LinCS – UMR 7069) (depuis 2022)
  • Membre du Comité d’unité de LinCS (depuis 2022)

Thèmes de recherche

Spécialiste de l’anthropologie de la nature, mes travaux s’intéressent aux conséquences du changement climatique, de l’industrie extractive, de l’agriculture et de l’élevage intensifs, sur les sociétés humaines. Ils s’attachent à décrire les relations que les groupes humains entretiennent avec leurs environnements. Pour y parvenir, mes recherches proposent une approche anthropologique fondée sur des enquêtes ethnographiques multi-situées afin de mettre au jour une pluralité de points de vue éclairant les réalités auxquelles le monde contemporain est aujourd’hui confronté et auxquelles il devra faire face à l’avenir. Elles s’articulent autour de trois questionnements interdépendants et visent à étudier :

1. Les flux migratoires, notamment les relations entre le changement climatique et les migrations.

2. Les effets du changement climatique et ceux du secteur extractif, de l’agriculture et de l’élevage intensif sur les sociétés humaines.

3. La transformation des cadres de pensée qu’implique la crise écologique actuelle en questionnant notamment la dichotomie entre les concepts de nature et de culture.

Les migrants forcés du climat

Mon intérêt pour les conséquences des transformations actuelles sur l’écologie humaine a d’abord pris corps à partir de l’étude des migrations forcées qu’engendre le changement climatique. Mon mémoire de maîtrise, publié par la maison d’édition de l’Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID) de Genève (Cometti, 2010), s’attachait ainsi à décrire la situation des îles Tuvalu, un État et archipel polynésien, dont les habitants des neuf atolls font et devront faire face à la montée des eaux qui menace de les submerger d’ici 2050. Ma démarche a consisté à mettre en relation l’explication scientifique du réchauffement planétaire avec une analyse juridique de la situation.

Les migrants soudanais de la « Jungle » de Calais

Dans le cadre de mes recherches sur les flux migratoires, j’ai en outre eu l’occasion de conduire une enquête ethnographique auprès des migrants soudanais de la « Jungle » de Calais. L’objectif de cette recherche était d’interroger le récit dominant qui présentait « le plus grand bidonville de France » comme un lieu sale et miséreux, en portant l’attention sur ce qui s’y crée et s’y affirme. De février à juillet 2016, j’ai mené une ethnographie dans le but de mieux saisir l’organisation sociale des migrants et la nature des liens qui se tissaient entre eux, mais aussi des relations qui se nouaient entre les communautés, les différents acteurs étatiques et les ONG. À travers des récits de vie et une description détaillée des structures sociales d’un endroit éphémère, ce travail a révélé une certaine réalité de la « Jungle » inaccessible à l’opinion publique.

Les Q’eros des Andes péruviennes face au changement climatique

J’ai poursuivi l’étude de l’influence du changement climatique sur les flux migratoires dans les Andes péruviennes au cours de mes travaux de doctorat en anthropologie et sociologie du développement, entrepris à l’IHEID. Le caractère novateur de cette recherche, publiée chez Peter Lang (Cometti, 2015) repose sur le fait qu’elle constitue l’un des premiers travaux s’appuyant sur la méthode ethnographique pour aborder ce thème. Elle propose une approche anthropologique des conséquences du changement climatique, afin de mieux comprendre l’interdépendance entre une société donnée et son environnement. Ma recherche s’est fondée sur une enquête ethnographique de 14 mois chez les Q’eros, un groupe autochtone des Andes péruviennes. Vivant sur les pentes de la cordillère Vilcanota (région de Cuzco), leur milieu de vie et leurs activités s’étendent sur trois « étages écologiques » situés entre 1 400 et 4 600 mètres d’altitude. La modification du régime des pluies, provoquée par le changement climatique, affecte leur production agricole, de même que l’état sanitaire de leurs troupeaux, essentiellement composés d’alpagas et de lamas. Mon travail a ainsi consisté à analyser le rôle que joue le changement climatique dans la migration des Q’eros, dont une part importante de la population commence depuis une dizaine d’années à quitter les montagnes pour se rendre dans les zones urbaines, en particulier à Cuzco. Leur réputation de chamanes les plus puissants des Andes péruviennes, autant que la popularité dont ils bénéficient dans la région puisqu’ils sont considérés comme les derniers Incas, leur permettent d’y proposer des cérémonies chamaniques pour les citadins et les touristes.

Cette étude démontre que le changement climatique ne peut uniquement s’appréhender comme une transformation de l’environnement physique des populations. En invitant à questionner, dans le prolongement des travaux de Philippe Descola, l’universalité présumée d’une approche causale fondée sur la dichotomie entre la nature et la culture, elle démontre qu’envisager la question du changement climatique à travers une approche qui tienne compte de la dimension sociale et culturelle de ses effets s’avère crucial pour mieux comprendre l’impact de celui-ci sur un groupe humain. La prise en compte de ces dimensions permet d’élargir les perspectives du débat. Une part importante des recherches sur le sujet tendent en effet à concevoir le changement climatique sous l’angle causal des activités anthropiques conduisant aux émissions de gaz à effet de serre, et appelant une réponse humaine de type adaptative. Dans cette vision des choses la migration est vue comme une forme d’adaptation au changement climatique. Pourtant, cette séparation entre nature et culture, qui caractérise notamment les sociétés dites occidentales, ne peut servir de fondement pour comprendre le rapport au changement climatique d’une société comme celle des Q’eros, où les plantes, les animaux et les phénomènes atmosphériques sont considérés comme partageant – totalement ou partiellement – des facultés, des codes moraux et des comportements également attribués aux êtres humains. Ma recherche a ainsi démontré la nécessité de tenir compte des représentations des Q’eros vis-à-vis du changement climatique, afin de pouvoir mettre en exergue la relation précise de celui-ci avec le phénomène migratoire.

L’impact de l’industrie extractive dans les Andes péruviennes

J’ai pu prolonger ces réflexions au cours de mes recherches postdoctorales entreprises au sein du Laboratoire d’Anthropologie Sociale (LAS), au Collège de France ainsi qu’au département d’anthropologie de l’University College London (2017). En abordant les dimensions politiques des effets du changement climatique et de l’industrie extractive minière dans les Andes péruviennes, j’ai analysé les controverses engendrées par la surexploitation des ressources naturelles et par leurs conséquences environnementales. J’ai notamment montré que l’opposition des sociétés andines face aux projets extractifs n’exprime pas simplement le refus d’une exploitation de leurs ressources, mais qu’elle relève bien plus d’une réaction contre la mise en danger d’un élément non humain faisant partie intégrante de leur société, qu’il s’agisse d’une montagne, d’un lac ou d’une rivière. L’ambition plus générale de mes recherches est de réussir à formuler un modèle d’analyse qui puisse considérer certaines entités non humaines comme de véritables sujets politiques. Là réside l’importance d’une approche anthropologique permettant de traduire en termes politiques ces considérations relationnelles et territoriales qui n’existent pas dans les institutions politiques et juridiques classiques d’origine occidentale.

Publications

Ouvrages

2015 : ‘Lorsque le brouillard a cessé de nous écouter’ Changement climatique et migrations chez les Q’eros des Andes péruviennes, Bern, Berlin, Bruxelles, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Wien, Peter Lang, 244 p.

2010 : « Réchauffement climatique et migrations forcées : le cas de Tuvalu », eCahiers de l’Institut, 5, Genève, Graduate Institute Publications, 87 p.

Direction d’ouvrages

2019 : Au seuil de la forêt. Hommage à Philippe Descola, l’anthropologue de la nature, Paris, Tautem, 1132 p. (avec Pierre Le Roux, Tiziana Manicone et Nastassja Martin).

2019 : Travaux de recherche des étudiant.e.s de l’Institut d’ethnologie 2018. Actes de la journée inter-années 2018, Strasbourg, Institut d’ethnologie, 252 p. (avec Luisa Arango, Matthieu Louis et Gaëlle Weiss, avec la collaboration de Léa Bernard et Elena Landmann).

Articles à comité de lecture

2020 : « Changement climatique et extraction minière chez les Q’ero des Andes péruviennes », Anthropologie et Société, 44(1), p. 215-240.

2020 : « Le pèlerinage des Q’eros (Cuzco, Pérou) au sanctuaire du Seigneur de Quyllurit’i. Une ethnographie itinérante de la connexion entre humains, lieux sacrés et divinités », América Crítica 4(1), p. 35-52 (avec Emanuele Fabiano et Cristian Terry).

2020 : « A Cosmopolitical Ethnography of a Changing Climate among the Q’ero of the Peruvian Andes », Anthropos, 115(1), p. 37-52.

2020 : « El Antropoceno puesto a prueba en el campo: cambio climático y crisis de las relaciones de reciprocidad entre los q’ero de los Andes peruanos », Antípoda. Revista de Antropología y Arqueología, 38, p. 3-23.

2017 : « Est-il possible de faire le portrait d’un migrant ? Dilemmes anthropologiques », Terrains, Portraits, Rubrique électronique, (avec Jean-Baptiste Eczet).

2017 : « Autodestruction », Dossier « Les sens de la maison », Sensibilités. Histoire, critique & sciences sociales, 2, p. 88-91, (avec Jean-Baptiste Eczet).

2015 : « The necessity for an ethnographic approach in Peru », Special issue, « Climate change, disaster and displacement », Forced Migration Review, 49, p. 14.

2014 : « La ‘energía vital’ y el retorno a la comunidad », Dossier « Arte tradicional y mirada surandina », Allpanchis, 77-78, p. 305-339, (avec Nathalie Santisteban)

Chapitres dans des ouvrages collectifs

2021 : « Indigenous responses to climate change in extreme environments: the cases of the Q’eros (Peruvian Andes) and the Gwich’in (Alaska) », in Paul Sillitoe (ed.) The Anthroposcene of Weather and Climate. Ethnographic contributions to the climate change debate, Oxford, Berghahn Books and The Royal Anthropology Institute, p. 122-141 (avec Nastassja Martin).

2020 : « La quotidianità dei migranti sudanesi nella Giungla di Calais. Uno sguardo etnografico », in Lorenzo Navone (sous la dir. de), Confini, mobilità e migrazioni : una cartografia dello spazio europeo, Milan, Agenzia X & Mimesis Edizioni, p. 127-152, (avec Jean-Baptiste Eczet).

2019 : « Introduction. Philippe Descola, l’anthropologue de la nature », in Geremia Cometti, Pierre Le Roux, Tiziana Manicone et Nastassja Martin (sous la dir. de), Au seuil de la forêt. Hommage à Philippe Descola, l’anthropologue de la nature, Paris, Tautem, p. 7-21, (avec Pierre Le Roux, Tiziana Manicone et Nastassja Martin).

2019 : « Non humain, trop non humain ? », in Geremia Cometti, Pierre Le Roux, Tiziana Manicone et Nastassja Martin (sous la dir. de), Au seuil de la forêt. Hommage à Philippe Descola, l’anthropologue de la nature, Paris, Tautem, p. 211-228.

2019 : « Cosmopolitica del cambiamento climatico tra i Q’eros delle Ande peruviane », in Emanuele Fabiano et Gaetano Mangiameli (sous la dir.), Dialoghi con non-umani: addomesticare, sedurre, trasformare, Milan, Mimesis Edizioni, p. 99-118.

2018 : « Changement climatique et crise des relations de réciprocité dans les Andes péruviennes. Les Q’eros et l’Anthropocène », in Rémi Beau, Catherine Larrère (sous la dir.), Penser l’Anthropocène, Paris, Presses de SciencesPo, p. 235-247.

Documentaires ethnographiques

2018 : « Il Signor di Quyllurit'i », Iceberg Film, (avec Emanuele Fabiano, Cristian Terry et Ulysse Mathieu).

Comptes rendus d’ouvrages

2018 : « Donne pastore, gauchos e figli del vento. Ecologie andine e reti di parentela nel Nord Ovest Argentino di Daniela Salvucci (2016) », Confluenze. Rivista di Studi Iberoamericani, 10 (2), p. 497-501.

Autres publications

2015 : « Climate change and the crisis of reciprocal relations among the Q’eros (Cuzco, Peru) », Notes from the Field, University College London (UCL) – Centre for the Anthropology of Sustainability (CAOS).

2011 : « Hommage à Jacques Grinevald », Globe. The Graduate Institute Review, 8, p. 24.

Valorisation de la recherche

2024

2023

2022

2021

2020

2019

2018

2017

2016

2015